Ils ont d’abord effrayé les voyageurs. Légendes et croyances les peuplaient de dragons et autres bêtes sauvages nées de l’imaginaire des hommes. La peur s’est transformée en fascination. Glaciers et sommets se donnaient alors en spectacle pour des aventuriers et voyageurs intrépides. Mais aussi les artistes, qui n’hésitaient pas prendre de l’altitude.
Jusqu’au 5 novembre, le musée des beaux-arts de Chambéry présente une exposition qui intéressera autant les passionnés de l’histoire de l’alpinisme que les amateurs de peinture, gravure et aquarelle. Le Genevois Jean-Antoine Linck est l’un des premiers à contempler les montagnes des Alpes avec un sens aigu de l’observation comme en témoignent ses toiles de la fin du 18è siècle. Elles nous parlent d’un temps où les glaciers descendaient jusque dans la vallée de Chamonix. L’artiste comprend vite le parti qu’il peut tirer de ses œuvres. Ses petits tableaux donnent à rêver et à suivre ses pas. Destinés au commerce, ils sont de très bons vecteurs de promotion des Alpes. C’est la naissance du tourisme.
LA NAISSANCE DU TOURISME
Les artistes les plus intrépides ne se contenteront plus de rester au pied des sommets. Marc-Théodore Bourrit, également Genevois, a inventé sans le savoir les topo-guides avec sa ‘Description des glacières de Savoye » (1773). Mais il faut attendre Gabriel Loppé pour voir les peintres gravir les sommets afin de faire partager leur pouvoir d’attraction avec le plus grand réalisme. Témoin ce grand format que présente le musée où l’artiste nous plonge au cœur de la mer de glace (1874). Pourtant, rien ne prédisposait cet enfant né à Montpellier, de santé fragile, à gravir des dizaines de fois le Mont-Blanc pour restituer au mieux le spectacle des crevasses et des séracs. Une grande exposition lui est consacrée jusqu’au 14 janvier au Fort de Bard, dans le Val d’Aoste. A noter également l’excellent dossier que lui consacre le dernier numéro de « La montagne et alpinisme », la revue du Club alpin français.
Cet automne, plusieurs rencontres et conférences proposent d’aller plus loin sur les peintres montagnards. Artistes mais aussi témoins précieux pour les scientifiques qui sont au chevet de nos montagne depuis deux siècles.
-Samedi 30 septembre et dimanche 1er octobre, 14h30 : visite avec les commissaires d’exposition.
-Samedi 14 octobre, 14h30, conférence sur le thème « Quand les œuvres d’art nous aident à comprendre les changements climatiques ».
D’autres rendez-vous et visites à trouver sur www.chambery.fr
JACQUES LELEU
PHOTO : Gabriel Loppé n’a pas hésité à gravir des dizaines de fois le Mont-Blanc pour en faire partager le pouvoir d’attraction avec le plus grand réalisme. Photo J.L