Walter Salles nous présente, dans un français parfait, son film au Comoedia, le 27 novembre 2024 ( photo JFM )
Walter Salles c’est l’auteur, entre autre, de « Central do Brasil » (1998 ) étonnante odyssée d’un petit garçon et d’une vieille dame à travers le Brésil profond et « Carnet de Voyage » (2004) qui narre le périple à travers l’Amérique latine ‘d’Ernesto Guevara avant qu’il ne devienne le « CHE ». Quand « Je suis toujours là » a été présenté à la Mostra de Venise en septembre 2024 ( où il obtint le prix du meilleurs scénario ) on n’avais pas vu de film de son auteur depuis douze ans . Il a été depuis distribué au Brésil avec un grand succès et arrive sur les écrans français le 15 janvier.
« Je suis toujours là », sans être un biopic, est centré sur un personnage ayant réellement existé : Eunice Paiva . Cette mère de famille fortunée s’est totalement métamorphosée quand la dictature militaire a arrêté et assassiné son mari, Rubens. Tout en reprenant des études de droit elle devint une intrépide militante des droits de l’Homme, lutant pour qu’on n’oublie pas les « disparus » de la dictature militaire brésilienne et , une fois la démocratie revenue, une défenseure des indiens. Pour présenter cette personnalité remarquable Walter Salles , nous a-t-il dit, s’est d’abord appuyé sur ses souvenirs : adolescent il a fréquenté la maison chaleureuse et accueillante des Paiva, près d’une plage de Rio et il a gardé un souvenir ému de l’atmosphère conviviale qui y régnait !. Pour les périodes suivantes il s’est appuyé sur le livre qu’a écrit un fils d’Eunice Paiva.
C’est Fernanda Torres qui incarne Eunice Paiva. Cette actrice, très célèbre au Brésil, est plutôt coutumière des rôles comiques : elle se coule pourtant avec aisance dans ce personnage dramatique, dont elle traduit, sans pathos, les sentiments et dont elle fait admirablement sentir la force de caractère et la determination inflexible : une parfaite réussite ! Détail insolite : pour jouer la dernière scène , sorte de postface située longtemps après le récit principal, Fernanda Torres cède la place à sa propre mère, Fernanda Montenegro, l’actrice principale de « Central do Brasil » ! L’ensemble de la distribution, très homogène, est à la hauteur de ces grandes actrices : Irréprochable !
Walter Salles nous a dit avoir commencé à envisager de faire ce film peu après la parution du livre de Marcelo Rubens Paiva en 2015. Mais ce sont les tentatives de glorification de la dictature brésilienne ,sous la présidence de Bolsonaro, qui lui ont fait prendre conscience de l’urgence de dire la vérité sur cette période ( 1964/1985 ) que la majorité des brésiliens n’ont pas connue. Et ceci d’autant plus, a insisté W.Salles, qu’aucun procès contre les responsables de violation des droits de l’Homme pendant la dictature n’a eu lieu au Brésil, contrairement à ce qui s’est passé dans d’autres pays d’Amérique Latine .
Jean-François Martinon