« LE MOHICAN » un film choc sur la Corse d’aujourd’hui !

Mara Taquin et Frédéric Farrucci présentent « Le Mohican » au Comoedia (photo JFM )

               Quand Frédéric Farrucci et Mara Taquin sont venu présenter leur film au Comoedia on ignorait que ce cinéma lyonnais allait recevoir le TROPHÉE DELUXE DE L’EXPLOITANT. Mais le seul fait que ce soit là que l’avant-premier du « Mohican » avait  lieu ( après tant d’autres avant-premières ) prouve que la plus vielle salle de cinéma de Lyon, en place depuis plus d’un siècle, joue un rôle majeur pour le rayonnement du 7° Art dans notre agglomération ! ZigZart se joint avec enthousiasme au concert de félicitations adressé à l’équipe du Comoedia par tous les cinéphiles Lyonnais !

              Après un premier long métrage situé dans la capitale F.Ferrucci est revenu à son pays natal : la Corse . « Le Mohican » est entièrement tourné dans l’ile de Beauté .  « Le film est inspiré d’un court métrage documentaire sur un berger du Sud de la  Corse que j’ai réalisé en 2017 » nous a-t-il dit. Ancré dans la réalité économique et sociologique de son héros le film empreinte les codes des « films de genre » pour accéder à une « dimension politique »  dont le réalisateur nous a dit qu’elle était essentiel pour lui . De fait le film parle volontiers le langage du Western , tant par l’importance qu’il donne au paysage que par ses thématiques : conflit pour un territoire et dimension mythique acquise , malgré lui, par le héros . « Il y a dans mon film quelque chose du John Ford de « L’Homme qui tua Liberty Valence » mais aussi du Melville de « L’Armée des Ombres »  nous a confié Farrucci;

              « Le Mohican » est un « film de traque » : Joseph , un des derniers berger du littoral corse, est poursuivi par la police et, surtout, par la mafia. Cette cavale haletante lui fait traverser une grande variété de paysages, mosaïque très contrastée d’images de la Corse d’aujourd’hui : pâturages parcourus par quelques chèvres et plages grouillantes de vacanciers, villages pittoresques bien léchés et bergeries délabrées,  villas avec piscines  et pauvres maisons rurales. Ajoutons à ces contrastes la question de la langue corse : d’usage courant dans le monde rural, bien moins utilisée par les corses des villes chez qui elle se partage, parfois dans la même phrase, avec le français, comprise , mais pas parlée, par les « expatriés » corses vivant sur le Continent,  et, bien sûr, ignorée des touristes ! Un abîme sépare deux Corses : « Deux civilisations se côtoient et sont incompatibles » dit Farrucci

                 La fuite solitaire de Joseph rencontre un formidable écho dans la population corse grâce aux messages qu’écrit sur les réseaux sociaux sa nièce  Vannina, corse du continent en vacance sur l’Ile et qui décide de rester sur place pour soutenir son oncle. En quelques jours le berger pourchassé devient un personnage de légende en faveur de qui se mobilisent activistes ou jeunes chanteurs ! 

                 Pour incarner ses personnages principaux le réalisateur a fait appel à des acteurs confirmés : Alexis Manenti et Mara Taquin. À Valenti, ci-devant flic dans « Les Misérables », il a demandé d’être un berger « très taiseux, qui, au fil des scènes se renferme sur lui-même ». Pari réussi pour cet acteur qui, bien qu’en partie d’origine corse, a du apprendre des rudiments de la langue du pays pour ce rôle ! Quoique belge Mara Taquin n’a pas eu ce problème puisque son personnage, qui vit sur la Continent, ignore la langue de ses ancêtres. Autour d’eux, les autres personnages sont tous corses, issus de casting sauvages ils donnent à l’histoire une incontestable authenticité !

                    Pour conclure on dira que le film répond  à son double objectif . Sur le plan politique, il dénonce avec force le surtourisme et ses effets délétères sur les populations ( et les paysages ) autochtones : les spectateurs du festival de Venise, qui savent les effets de la sur-fréquentation vacancière,  ne s’y sont pas trompé et ont fait un triomphe au « Mohican ». Coté film d’aventure il captive et l’on est constamment pris par l’action. Comme dans un western ou un thriller, à la différence près que la fin, très ouverte, échappe aux lois du genre ! Quoiqu’il en soit « Le Mohicant » est un film passionnant, à ne pas manquer !

Jean-François Martinon

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