
Gwenaëlle Lenoir est une journaliste indépendante qui travaille pour plusieurs médias dont Médiapart. Spécialiste du Moyen-Orient et de l’Égypte elle a effectué des reportages en Syrie, Irak, Liban, Soudan…
Elle a reçu le Prix Relay des voyageurs lecteurs pour Caméra obscura, publié chez Julliard et en Pocket.
Pour Gwenaëlle Lenoir, « ce livre est un roman dont le personnage principal est réel. Ce photographe existe et vit caché quelque part en Europe. Son nom de code est César. Les atrocités décrites sont avérées, les faits sont documentés mais sa voix est la mienne. »
Le livre est découpé en 33 courts chapitres. Dès le premier, le narrateur, César nous annonce sa mort : « J’ai été abattu par un traître sur cette route grise et droite. »
César est marié et a deux enfants. Il a une vie de famille heureuse et tranquille. Le pays est dirigé par un dictateur qui a succédé à son père lui-même dictateur. On devine très vite qu’il s’agit de la famille Assad :, Hafez puis Bachar, qui règne près de 55 ans sur la Syrie.
Un jour il est embauché dans un hôpital pour photographier en quatre ou cinq morts qui lui sont apportés. Il doit les répertorier avec leur nom, la date du jour de la photo et la cause du décès. La cause lui est transmise. Par son supérieur. C’est la consigne.. Son chef, moustache frémissante, lui déclare dès son arrivée : « L’état ne supporte pas l’imperfection » On sent immédiatement le lourd poids d’une hiérarchie autoritaire et brutale.
Le premier jour, quatre corps sont à photographier. Les photos sont archivées dans l’ordinateur mis à la disposition de César à la demande du pouvoir. Puis le nombre de morts augmente de jour en jour. Les raisons déclarées des décès sont diverses : chutes, défenestrations, rixes etc pourtant les corps sont horriblement mutilés. Et le temps passant leur nombre est tel qu’on ne sait plus où les mettre. Les photos sont toujours archivées dans l’ordinateur installé dans un petit bureau où César est seul. Il a effectué cet horrible travail pendant deux ans
Une résistance secrète s’organise malgré les dangers de dénonciation et de surveillance. Comment faire connaître les méthodes utilisées par la dictature? Comment les dévoiler au monde entier ? Quels sont les circuits pour s’échapper de cet enfer? Que vont devenir Ania, sa femme Najma et Jamil ses enfants ? Et que va devenir César ?
Vous saurez tout cela en lisant « Camera Obscura » Ce n’est pas un récit mais bien un roman sur un personnage qui a existé. Tous les faits décrits sont vrais Les pensées et les actes de tous ceux que l’on rencontre sont le fruit de la reconstitution de l’autrice. Un roman magistral !
Claude Guest
PHOTO : Gwenaëlle Lenoir était l’invitée du dernier festival du premier roman à Chambéry.