Marcher sans but, mettre un pas devant l’autre et laisser l’esprit vagabonder. C’est sans doute ce qui nous manque le plus dans un monde ultra-connecté, obsédé par la performance. Jusqu’au 17 novembre, le musée des beaux-arts de Chambéry nous invite au contraire à arrêter le temps pour laisser vagabonder le regard et la pensée. Avec « Rêveries de promeneurs solitaires », nous voilà à notre tour invités à retrouver les vertus de la marche, en regardant comment elle a inspiré le philosophe Jean-Jacques Rousseau et le peintre Olivier Bernex à deux siècles d’intervalle.
Commençons par nous attarder devant le tout petit carnet dans la vitrine, très peu exposé en raison de sa fragilité. Il nous montre comment Rousseau consignait ses pensées, d’une écriture si serrée qu’elle en est à peine lisible. Or ces rêveries allaient devenir un best-seller après sa mort, avant de devenir un des sujets d’étude qui ont tant ennuyé des générations de lycéens. Passons du plus petit au plus grand, en allant découvrir l’immense toile au fond de la salle. Un homme à terre, entouré de taches de peinture. Une forme d’autoportrait à la fois tragique et dérisoire du peintre tombé dans son atelier.
La peinture d’Olivier Bernex ne séduit pas forcément au premier regard. Elle se mérite. Comme en promenade, il faut justement prendre son temps. Peu à peu des formes se dessinent dans le chaos apparent. L’artiste aime brouiller les pistes, laisser des traces d’une vie dans la jungle des taches de couleur. On saisit alors son rapport physique, charnel à la peinture, comme l’a rappelé le philosophe Michel Guérin lors d’une passionnante conférence lors du week-end du patrimoine. Chez Rousseau comme chez Bernex, la nature est beaucoup plus qu’un décor pour prendre de l’exercice. Elle nous libère la créativité, nos pensées, notre imaginaire. Elle est tout sauf ordre et symétrie. Elle est le royaume des contrastes.
Le musée des beaux-arts propose plusieurs visites guidées (25 octobre et 16 novembre). Le 17 octobre, Nicolas Bousquet, directeur des musées, reviendra sur le destin « de ce livre clandestin » de Rousseau. A noter encore des ateliers pour enfants afin d’entrer dans l’intimité des deux promeneurs solitaires. Sans oublier une séance de sophrologie le 7 novembre pour découvrir « une perception émotionnelle » des œuvres d’Olivier Bernex.
Plus d’informations sur https://www.chambery.fr/88-les-musees.htm
PHOTO : Les œuvres d’Olivier Bernex et son univers sont à découvrir jusqu’au 17 novembre. Photo J.L